Jean T.

https://lecturesdereves.wordpress.com/

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Conseillé par (Libraire)
19 mai 2014

Est-il possible d'échapper au déterminisme de sa classe sociale et de venir un grand patron, un grand artiste, un intellectuel ? Oui, à condition d'avoir les dispositions requises, que la chance ys contribue et de le mériter par son travail.
C'est ainsi que Franck, fils d'ouvrier et d'immigré, est devenu le patron de la branche française d'un grand groupe pétrolier, sans avoir suivi la filière classique des grandes écoles.


"Franck" (qui n'a pas souhaité que soit publié son nom) croit "qu'on est victime si on le veut" et qu'il tient une part de sa réussite à la protection de "son ange gardien". "On a eu de l'ambition pour moi", dit-il.
Bien sûr, son intelligence brillante, son énergie, son implication, sa force de conviction et sa loyauté ont permis ce parcours, mais aussi son groupe anglo-saxon qui a été plus attentif à son potentiel qu'à ses diplômes. Frank a gravi presque tous les échelons de son groupe sans jamais cacher ses origines modestes (dont il n'a pas honte, à l'inverse d'Annie Ernaux), il tient le travail pour une valeur suprême et reste simple dans ses relations, il ne montre pas ses richesses. Pour ces rasions, il n'éprouve pas la sensation d'avoir trahi sa classe sociale d'origine. Faire un plan social ne l'a "jamais" empêché de dormir, car c'est "travailler pour assurer un avenir à la majorité des salariés restant dans l'entreprise".
Franck croit que le travail et le mérite, plus un peu de chance, permettent d'accéder aux plus hauts niveaux de vie et de responsabilité. Peut-être est-ce vrai ? Si des parcours de vie comme celui-ci sont encore possible, alors ils témoignent de la puissance de l'idéal méritocratique au moment où l'on affirme que "l'héritage et la fortune familiale pèsent de plus en plus sur le destin des individus". .
Ce livre n'est pas un témoignage, mais le récit qu'en fait le sociologue Jules Naudet, ce qui nous permet de bénéficier d'analyses et de mises en perspectives d'une grande finesse. Si c'est un roman, c'est une lecture agréable et profitable. Si c'est une étude sociologique, il ne faut pas manquer de la lire, car elle est d'une grande clarté.

Les Presses de la Cité

Conseillé par (Libraire)
11 mai 2014

Inquiétant...

Si certaines évolutions technologiques et biotechnologiques vous laissent perplexes, lisez ce roman, il vous dérangera tout en confirmant vos craintes.
Car, alors que je le lis, la presse nous rappelle que nos données personnelles qui circulent via Internet ne sont pas très protégées, que l'on peut savoir beaucoup de choses sur nous, notre façon de vivre, nos fréquentations, notre consommation. Ce qui n'est pas si éloigné du monde de Moxyland et de leurs téléphones portables qui contiennent leurs documents d'identité et leur histoire personnelle. Nous venons d'apprendre qu'une bactérie mutante a été dotée d'un code génétique artificiel et qu'elle peut se dupliquer d'elle-même. Est-ce si éloigné des nano-particules introduites dans le corps de Kendra, la jeune photographe, qui es nourrit en buvant du Ghost ? Et de ces chiens améliorés de la même façon ? Peut-être cette bactérie servira-t-elle à créer une installation dans une galerie d'art, comme cet "hybride de plastech biomanufacturé auquel on a greffé un système nerveux tout juste suffisant pour lui permettre de répondre aux stimuli de différentes manières" qui trône près des photographies de Kendra et qui est bien une masse vivante ?
Le roman se déroule en Afrique du Sud. Son côté futuriste le rend adaptable à tout pays développé du globe. Moxyland est un monde semblable au nôtre, avec la surveillance, la séparation des classes sociales, la gentrification urbaine, la peur du déclassement, la foi naïve en la science et dans le progrès. Sauf que chez nous, les Droits de l'homme sont encore respectés. Sauf que dans le roman, l'informatique et les technologies sont très avancées et ont pris beaucoup d'importance. Alors certaines personnes cherchent à en tirer avantage pour elles-mêmes et d'autres résistent, au péril de leur vie.
Le roman aborde des problèmes liés au choix que fait une société de l'application des découvertes scientifiques : contrôle ou préservation de la vie privée, marchandisation des corps ou utilisation strictement médicale des biotechnologies, création et utilisation d'armes bactériologiques létales, contrôle des populations par diverses technologies occultes, utilisation d'une informatique si invasive qu'elle provoque les activistes au piratage.
Ce roman de science-fiction, comme tant d'autres nous prévient que les évolutions technologiques peuvent avoir, si on n'y prend garde, des effets désastreux
C'est un roman qui met en scène le virtuel dans un pan de vie ordinaire. Le recours à de nombreux néologismes et le vocabulaire geek pourront gêner les lecteurs qui ne sont pas digital natives (le glossaire en fin d'ouvrage leur sera une aide précieuses). De même le rythme rapide et le style condensé. Mais ce récit angoissant d'un futur totalitaire est captivant. Il possède une vertu préventive : ne pas laisser la puissance économique, technologique et politique échapper au pouvoir des citoyens. L'appendice rédigé par Lauren Beukes est affirmatif : ne renonçons pas à nos droits, luttons contre la désinformation, gardons un regard acéré et critique. Ce à quoi ce roman nous aide...

Conseillé par (Libraire)
4 mai 2014

Dérangeant

Est-il possible d'avoir un passé de petit truand et de se refaire une virginité, de passer à autre chose que le trafic de drogue ? Oui, sans doute, mais pas en restant dans son quartier.
Ecrit dans le langage dont on imagine qu'il est celui des quartiers, ce court roman est inquiétant et dérangeant pour ceux qui croient encore en l'État de droit, en la Justice et en l'honnêteté. .

Conseillé par (Libraire)
4 mai 2014

Dérangeant

Est-il possible d'avoir un passé de petit truand et de se refaire une virginité, de passer à autre chose que le trafic de drogue ? Oui, sans doute, mais pas en restant dans son quartier.
Ecrit dans le langage dont on imagine qu'il est celui des quartiers, ce court roman est inquiétant et dérangeant pour ceux qui croient encore en l'État de droit.

Conseillé par (Libraire)
30 avril 2014

Pour se réprésenter la transition

L'ouvrage annonce dès la première page "qu'à poursuivre dans la voie actuelle, nous allons vers des lendemains qui font peur", mais il ajoute peu après que "le pire n'est jamais sûr" et que s'engager délibérément dans la transition écologique est un moyen pour vivre mieux dans une société moins inégalitaire, plus démocratique et attentive aux besoins de tous.
Rédigé par des économistes, l'ouvrage propose une analyse permettant de se représenter la crise : crise énergétique avec la rareté qui s'annonce, crise des sociétés qui ne mesurent leur santé qu'au moyen du PIB -qui pourtant échoue à assurer le bonheur, crise d'une économie mondialisée et dérégulée, crise politique des gouvernements dont l'horizon se limite à la prochaine élection, crise d'un progrès qui se résume à une croissance désormais impossible, crise d'une agriculture dont le productivisme est soutenu par une PAC mal orientée, crise d'une "consommation massive de biens et services puisant, pour leur production, dans le stock de ressources non renouvelables de la planète".
L'espoir existe, à condition de ne pas lambiner, de ne pas se contenter de faire du Green Washing. Il faudra décider que le capitalisme doit se réformer en profondeur, voire disparaître pour laisser place à une "économie de l'environnement", une économie soutenable capable de maintenir constants les stocks de ressources naturelles. Les auteurs prennent le temps de faire une très synthétique histoire économique depuis les physiocrates du 18e siècle jusqu'aux économistes qui, de nos jours, remettent en cause les indicateurs du PIB, reconnaissent les limites de la biosphère et veulent que nous vivions mieux. Pour mettre en œuvre la transition, ils soutiennent la nécessité d'une planification écologique et d'un contrôle de la finance. Ils espèrent aussi en l'activité de citoyens s'engageant dans des expérimentations locales, et envisagent un nouveau rapport au travail et à l'emploi.
Les données disséminées dans le texte permettent de réfléchir et de prendre conscience de ce que nous gaspillons. Elles sont utiles pour savoir si la mobilité pourra être soutenable, si on pourra verdir le transport aérien, si on peut manger mieux et autrement, si on pourra stocker les énergies renouvelables, comment réintégrer dans les territoires des activités de production délocalisées.
En conclusion, les auteurs affirment qu'on peut réduire notre pression sur les ressources sans réduire notre bien-être individuel et collectif. Que nos techniques sont à même de nous permettre de réorienter nos modes de production. Ils repèrent qu'une transition démographique est en marche, qu'une conscience écologique se développe. Ces quatre points constituant une ouverture à la transition écologique.
Au bout du compte, voici un petit ouvrage de lecture aisée qui aide à imaginer ce que pourrait être la transition écologique. Transition nécessaire car nous habitons la même Terre !